De son séjour à Yport en 1861, Monet rapporte deux paysages diurnes dont ce pastel, Yport, les grottes, et Yport (cmdxsf). Dans ce dernier, Monet propose une vue d’ensemble du village d’Yport, véritable havre protégé des vents et des courants par la pointe que forme sa falaise d’Aval. Dans Yport, les grottes, l’artiste s’est rapproché de la roche ; il se tient au pied de la falaise d’Aval et de ses cavités troglodytes, appelées les « gobes ». Celles-ci servaient tantôt d’habitation, comprenant parfois deux étages et un petit jardin fermé par une barrière, tantôt d’écurie ou de magasin. L’ornementation des fenêtres et des portes était constituée de gros silex maçonnés. Les cartes postales de l’époque montrent que Monet a fidèlement reproduit le litage de la roche, alternance de craie blanche et de grès sombre . La date de 1861 qui figure au dos de ce feuillet doit être retenue.
Le baryton Jean-Baptiste Faure (1830-1914) est le premier propriétaire de ce pastel2. Fervent collectionneur des impressionnistes, Faure acquiert de nombreuses peintures et pastels de Monet. En 1877, il fait construire sa maison à Étretat ; il y expose sa collection d’exception, la transformant en véritable galerie de l’art moderne. En octobre 1885, il y reçoit Monet et sa famille pendant dix jours. Faure achète cinq pastels dont trois représentent la petite cité balnéaire d’Étretat, Yport (cmdxsf), Étretat, l’Aiguille et la porte d’Aval (cmoodj), et Étretat, la Manneporte à marée basse (cmfejs). Faure acquiert également Nuages sur la mer (CMBAGU) et cette vue des grottes à Yport.
Le musicologue et critique d’art Henri de Curzon (1861-1942) dans son ouvrage sur Faure1 dit qu’« il s’éprit surtout de la peinture, et de la peinture la plus moderne, avec passion ». Il souligne l’attrait toujours renouvelé du collectionneur qui rechercha les meilleures occasions d’enrichir sa collection […] « Deux ventes qui firent quelque bruit à leur époque et qui en feraient bien d’autre aujourd’hui, eurent lieu ainsi en 1873 et en 1878. La première ne comportait pas moins de 5 Corot et de 6 Delacroix (dont Les deux Foscari, Ophélie, Le Christ au Tombeau) avec des Jules Dupré, des Millet, des Rousseau, un Troyon, etc. La seconde, reflet plus direct de ses goûts avancés, renfermait, avec des Corot encore, et des Jules Dupré, des toiles de Claude Monet, Pissarro, Diaz, Courbet, Jongkind, Fortuny, Boldini, Manet enfin, qu’il avait été l’un des premiers à apprécier et dont il garda toujours quelques-unes des œuvres maîtresses. » Faure n’hésite pas à se dessaisir de peintures naturalistes de la première moitié du XIXe siècle pour investir dans des œuvres de ses contemporains.
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